Comment l’éthique influence-telle la sélection canine moderne ?
L’influence de l’éthique sur la sélection canine moderne préconisée par Alliance Française Canine.
L’éthique joue un rôle crucial dans la sélection canine moderne en encourageant des pratiques responsables qui privilégient la santé et le bien-être du chien.
La sélection canine a longtemps été guidée par des critères esthétiques, dictés par les passionnés de chiens. Cependant, aujourd’hui, l’éthique de la sélection met au cœur de ses préoccupations le bien-être animal. Il ne s’agit plus seulement de « formater » les chiens pour répondre à des désirs esthétiques, mais de protéger leur autonomie et leur capacité à exister pour eux-mêmes.
La sélection éthique repose sur la valeur génétique additive, qui mesure le potentiel génétique d’un chien reproducteur en tenant compte des effets additifs de ses gènes. Cela permet non seulement d’améliorer et de conserver une population canine, mais aussi de viser un phénotype qui soit à la fois esthétique et représentatif du caractère idéal de la race.
Exemple du Berger Allemand
Le Berger Allemand est une race connue pour ses capacités de travail, son intelligence et sa loyauté. Lorsqu’on applique la sélection éthique à cette race, plusieurs aspects sont pris en compte :
- Santé et Bien-être : On s’assure que les chiens choisis pour la reproduction n’ont pas de prédispositions génétiques à des maladies courantes dans la race. Cela implique l’utilisation de tests génétiques pour identifier et éviter les allèles responsables de ces maladies mais aussi prendre en compte l ’ interaction complexe entre ses gènes et son environnement. Cette interaction est appelée « épigénétique». Prenons l’exemple de la dysplasie de la hanche : un chiot génétiquement prédisposé à la dysplasie peut voir sa condition s’aggraver s’il reçoit une alimentation trop riche en calories pendant sa croissance, entraînant une prise de poids rapide qui met une pression excessive sur ses articulations en développement. A l’inverse, une alimentation équilibrée et un contrôle du poids aide à minimiser l’expression de cette prédisposition génétique.
2.Caractère et Comportement : Le Berger Allemand doit conserver ses aptitudes naturelles pour le travail, comme la garde ou le sauvetage. La sélection doit donc favoriser les chiens qui montrent un bon équilibre entre obéissance et indépendance.
3.Morphologie Fonctionnelle : Bien que l’apparence soit importante, elle ne doit pas compromettre la santé du chien. Par exemple, un dos trop incliné peut être esthétiquement recherché mais peut aussi causer des problèmes locomoteurs. La sélection éthique vise à maintenir une morphologie qui supporte les fonctions naturelles du chien sans exagération nuisible
Cette approche est cruciale, car elle garantit que les chiens restent fiables dans l’exécution de leurs fonctions tout en ayant la possibilité d’agir de manière autonome. Il est important de reconnaître que plus d’un siècle et demi de sélection a montré que l’objectif ne peut plus être uniquement esthétique. Les chiens doivent pouvoir s’épanouir dans une relation harmonieuse avec les humains, où ils ne sont pas seulement soumis, mais capables de répondre avec justesse aux ordres. Cette autonomie est essentielle pour préserver leur bien-être et leur qualité de vie. Au fil des millénaires, la cohabitation entre l’homme et le chien a renforcé la capacité des chiens à s’adapter à notre mode de vie tout en conservant leur identité propre. Cette relation symbiotique doit être respectée et promue dans les pratiques modernes d’élevage. Protéger cette part d’action autonome est fondamental pour éviter les dérives liées aux conceptions radicales actuelles des droits des animaux. En somme, l’éthique moderne en matière de sélection canine cherche à équilibrer les besoins esthétiques avec le bien-être et l’autonomie des chiens. En adoptant ces pratiques, nous assurons non seulement la pérennité des races canines, mais aussi leur épanouissement dans un monde où leur rôle dépasse celui d’un simple compagnon esthétique.
La sélection canine doit impérativement prendre en compte l’impact des standards de race sur la santé des chiens. En effet, la recherche de certains traits morphologiques, souvent dictée par des interprétations déviantes des standards, peut entraîner des problèmes de santé et réduire le bien-être animal. Par exemple, une pression sélective sur des détails esthétiques inutiles, comme chez le Caniche où l’on pénalise certaines couleurs de poil sans impact sur la santé, contribue à la consanguinité et à une diversité génétique réduite.
Un autre exemple est le risque accru de syndrome obstructif respiratoire chez les chiens brachycéphales. Ces chiens, dont le museau est extrêmement court en raison d’interprétations extrêmes des standards, souffrent souvent de problèmes respiratoires graves.
De plus, la séparation entre les « types de beauté » et les « types de travail » dans certaines races, comme le Setter Irlandais, crée une opposition entre l’apparence esthétique et la fonction d’origine du chien. Les standards flous ou imprécis permettent des interprétations divergentes qui mènent à la création d’hypertypes. Ces hypertypes exagèrent les caractéristiques du standard au détriment de la santé des chiens.
Pour éviter ces dérives, il est crucial que les juges et les éleveurs responsables de race s’assurent que les standards soient clairs et précis, et qu’ils sensibilisent les éleveurs aux dangers de la consanguinité et d’une pression sélective excessive.
Vers une Réévaluation des Standards
Face à ces constats, une réévaluation des standards de race s’impose. Cette démarche doit s’articuler autour de plusieurs axes :
- Intégrer la Santé et le Bien-être Animal : Les standards doivent privilégier la santé et le bien-être des chiens plutôt que des critères esthétiques arbitraires. Des caractéristiques favorisant des problèmes de santé, comme un museau excessivement court, devraient être proscrites.5
- Clarifier et Préciser les Standards : Des standards clairs et précis, axés sur les proportions et les rapports plutôt que sur des détails insignifiants, limiteraient les interprétations divergentes et la création de « chiens bis ».
- Promouvoir la Diversité Génétique : Encourager la sélection à partir d’un pool plus large de reproducteurs et limiter le nombre de saillies par mâle permettraient de préserver la diversité génétique et de réduire les risques liés à la consanguinité.
- Former les Juges et les Éleveurs : La formation des juges et des éleveurs doit mettre l’accent sur une culture cynotechnique approfondie, les sensibilisant aux conséquences de la sélection morphologique excessive et les encourageant à privilégier la santé et le bien-être animal.
- Impliquer les éleveurs : en tant que sélectionneur et garants de la santé animale, ont un rôle crucial à jouer dans la sélection canine.
L’éthique de sélection impose un « engagement moral »
L’engagement moral dans la gestion responsable des races canines est un aspect essentiel de l’éthique de sélection. Cet engagement implique de respecter les aptitudes naturelles de chaque race et d’éviter les pratiques qui compromettent la santé génétique des chiens. La singularité et l’ancienneté des liens entre le chien et l’homme imposent un devoir moral à l’humanité pour gérer les races canines de manière responsable. Pour concilier beauté et bien-être animal, plusieurs actions concrètes sont nécessaires. Il est crucial de respecter les aptitudes naturelles de chaque race, en veillant à ne pas sacrifier la fonction au profit de l’esthétique. Par exemple, un chien de berger doit conserver ses aptitudes au travail même si son apparence diverge légèrement du standard de beauté.
De plus, il faut éviter la création de « chiens bis », qui s’éloignent du type racial moyen pour correspondre à des interprétations déviantes des standards, car cela peut entraîner des problèmes de santé liés à l’exagération de certains traits morphologiques. Les standards doivent être clairs et raisonnables pour éviter des interprétations divergentes qui pourraient figer la race ou empêcher son évolution naturelle. Il est également important d’éviter les pratiques qui compromettent la santé génétique, comme limiter la consanguinité et éviter la pression sélective sur des détails inutiles. Par exemple, chez les chiens brachycéphales, il est crucial de prendre en compte l’indice crânio-facial pour minimiser le risque de syndrome obstructif respiratoire.
Promouvoir une culture cynotechnique responsable est également essentiel. Cela inclut la sensibilisation des éleveurs, juges et propriétaires aux conséquences de la sélection morphologique et la promotion de pratiques d’élevage responsables. Les juges doivent être formés pour éviter de privilégier des détails morphologiques sans importance et être conscients du risque d’hypertype. Les éleveurs et vétérinaires jouent un rôle crucial en veillant à la santé génétique des effectifs et en conciliant esthétique et santé dans l’élevage canin.